♛ Anecdotes en vrac : sur son trente-et-un, en toute circonstance / maîtrise l'étiquette des convenances à la perfection / a été sensibilisée à la musique et à la danse de salon auprès de son époux / est d'une maniaquerie maladive / s'abstient autant que possible de porter des références à l'Eglise de Solaris comme le veut la coutume Azovéenne / ne tient pas vraiment l'alcool, évite donc d'en boire / malgré les apparences, est une romantique dans l'âme / s'est vue imposer un certain nombre de Pénitences avant d'obtenir le droit de se marier / a obtenu son nom d'épouse mais jamais le titre de Baronne / aime la musique dite classique et l'opéra / n'est pas réellement portée sur les disciplines sportives et assiste aux tournois de l'école que par obligation.


2899 • 0 an ⎯ C’est avec plusieurs semaines d’avance que la petite Solveig fit son entrée dans le monde, impatiente d’en découvrir les mystères et apparaissant déjà là où on ne l’attendait pas. Seconde fille du couple Mellynn, elle fit instantanément de bonheur des deux parents mais surtout de sa sœur aînée, Astrée, qui veilla sur elle comme sur la prunelle de ses yeux. La cadette eut une enfance heureuse et épanouissante au sein du cocon familial. Solveig, d’une nature étonnamment calme pour une enfant de son âge, semblait s’intéresser de tout et s’émerveillait de la moindre chose. Gamine discrète mais sachant déjà ce qu’elle veut, elle se montrait docile et patiente, se montrant parfaitement indifférente à toute forme de chahut enfantin. Aussi ne se faisait-elle jamais prendre, servant d’exemple pour les plus perturbateurs de son entourage.

2917 • 18 ans ⎯ Inquiets de la voir s’isoler dans la bibliothèque du clan au lieu de profiter des divertissements et frivolités de son âge, on lui présenta Jasper, dont la famille vivait de l’autre côté de la colline. Tous s’accordaient à dire qu’ils feraient un beau mariage et qu’ils se complétaient à merveille. Solveig elle-même n’était pas contre cette idée, car au-delà même de l’arrangement, elle lui trouva bon nombre de qualités et de points communs qui feraient de lui un excellent partenaire de vie. Ainsi, ils se fréquentèrent pendant plus d’un an, ivresse d’un premier amour et découverte de tendres sentiments, réciproques pendant un temps. Il y a des amours qui sont toute une vie de d’autres qui n’ont qu’une saison. Le leur était malheureusement de ceux-là. Car lorsque la jolie Myra croisa le regard de Jasper lors de la veillée d’Ostara, celui-ci ne parvint plus jamais à s’en détacher. Solveig accepta la situation, reconnaissant volontiers ces deux-là s’entendaient à merveille et par amitié pour son premier compagnon et ce qu’ils avaient partagé, décida de s’effacer sans en garder trop de rancune. Elle demanda toutefois à choisir elle-même celui qui partagera sa vie, et on le lui accorda.

2924• 25 ans ⎯ Ainsi elle était retournée à ses livres, partenaires fidèles qui ne lui avaient jamais fait défaut. Elle en avait même fait venir quelques-uns des autres territoires unis, notamment d’Athanatos lors de leurs derniers échanges commerciaux. Une compagnie que peu lui enviait mais avec laquelle elle s’épanouissait. Elle en faisait d’ailleurs profiter les plus jeunes, partageant avec eux ses connaissances pour les instruire et les cultiver comme toute bonne préceptrice du clan serait en mesure de le faire. Sa nature douce et bienveillante rendait l’apprentissage moins contraignant chez les plus retords et plutôt apprécié chez les autres mômes. Du moins aimait-elle à le croire. C’est cette même nature bienveillante qui fit détourner les yeux de Enoch Reeve ce jour-là, alors qu’une cargaison de riches marchandises d’Azoven était mise à quai. Cet humain avait du charme, il était distingué et Solveig su que quelque chose s’était créé entre eux ce jour-là. Quelque chose qu’elle parvint à retranscrire dans de nombreuses lettres et c’est autant de plis qu’elle recevait en retour. Des échanges épistolaires qui étaient loin de plaire ici, à Pasea et sa famille lui en fit d’ailleurs clairement la remarque. Pour la première fois elle se brouilla avec sa sœur. Mais pour la première fois, elle décida de continuer malgré tout.  

2929• 30 ans ⎯ Il fallu emporter un sac de plus. Pour les livres bien-sûr. Solveig n’avait pas ailleurs que très peu d’autres biens, se s’attachant que très peu aux apparats et autre babioles superflues du quotidien. Cela allait bientôt changer, mais elle ne le savait pas encore. Une dernière fois, elle se retourna, admirant la vallée chatoyante de son île, ses falaises brumeuses au loin et sa forêt dont elle garderait de ses nombreuses ballades sous la canopée un souvenir impérissable. Elle avait tout consigné, pour être sûre. Chaque effluve, chaque nuance de couleur…chaque visage. Des carnets d’impressions, d’images. De vie. Car c’était une partie d’elle qu’elle laissait ici, avec les siens qui ne pouvaient ouvrir les yeux, trop occupés à forger de nouvelles lames et de nouvelles rancœurs. Enoch ne serait jamais le bienvenu ici. Et pourtant, elle ne pouvait plus vivre ainsi, à se languir de la prochaine cargaison marchande pour espérer le revoir, exister quelques instants, et le regarder partir à nouveau. Alors, elle partirait aussi…

2929• 30 ans (bis) ⎯ La peine du départ avait laissé place à l’appréhension du voyage, qui s’effaça au profit d’une entière désillusion une fois le pied mis à terre. Evidemment, Solveig s’était préparée à devoir apprendre toutes les us et coutumes de ce nouveau pays, mais elle ne s’était pas attendue à devoir se battre pour cela. A Azoven, une shtrigue n’avait que peu de droits, et certainement pas celui de se marier à l’une des nobles familles baronnes du territoire. Pas dans ces conditions en tout cas. Sous la protection d’Enoch et de son influence, elle pu tout de même évoluer à la capitale. Le « joli spécimen » devrait d’abord faire ses preuves et s’adapter avant de pouvoir réclamer quoique ce soit. C’est ce qu’elle fit, Solveig, entamant alors une nouvelle sphère d’apprentissage pour, elle-même cette fois. Si elle approuvait les récentes actions de l’Empereur -au même titre que le reste de la famille Reeve- elle comprit que cette politique d’ouverture était récente et qu’elle ne faisait pas l’unanimité dans le pays. Aussi, elle resta discrète, réservée…à sa place.

2922• 33 ans ⎯ Voilà maintenant trois ans que « l’étrangère » s’était installée à Azoven, élisant domicile dans cette famille du comté de Kyloh qui pourtant n’avait rien demandé et avait toujours été sans histoire et qui se retrouvait aujourd’hui sous le feu des projecteurs. Car après trois ans de sacrifices, d’intimidations en tout genre et de tracas, l’autorisation leur fut enfin accordée par l’Eglise de Solaris, avec le ferme appui de l’Empereur pour leur forcer la main. Le mariage eut lieu, sans doute pas comme Solveig -éternelle romantique- l’avait imaginé et sans tout l’ostentatoire qui parait habituellement à ce genre d’évènement. Mais ils étaient mariés, enfin. Pour cela, Enoch a dû renoncer au titre de Baron et le céder à son frère cadet : une shtrigue ne pouvait prétendre à un quelconque rang au sein de la société. C’était probablement trop tôt. En contrepartie, cette dernière accepta finalement d’adopter les traditions de Solaris et cela ne se fit pas sans un certain nombre de pénitences, de concessions et un profond dégoût d’elle-même. Privée de ses rituels les plus élémentaires, la magie de Solveig était au plus bas et par conséquent, son moral aussi. Ses lettres à destination de sa sœur restaient sans réponse et elle commençait à douter d’en recevoir un jour. Et c’était sans parler du fait que l’Eglise, bien qu’ayant accepté qu’une telle union se fasse, avait mis son véto quant au fait de leur accorder un héritier : ils ne seraient être tenus pour responsable de la naissance d’un bâtard consenti. Ainsi, le couple n’eut jamais d’enfant mais ils se soutinrent l’un l’autre, comme les deux époux qu’ils étaient à présent.

2929• 37 ans ⎯ La suite prit enfin un tournant favorable pour Solveig. Bien qu’étant encore « l’originale » de la famille, elle mit tant d’acharnement à son éducation Azovéenne et à son instruction de l’étiquette qu’elle devint rapidement bien plus formelle et protocolaire que la plupart des natifs du territoire et on lui reconnût bien volontiers un savoir-vivre et des manières élégantes, doublées d’une aisance plus qu’adéquate lorsqu’il s’agissait d’évoluer dans les sphères moins insignifiantes. A presque quarante ans, Solveig n’en paraissait que vingt à peine entamés et il n’était maintenant guère plus question d’aversion que de jalousie lorsqu’elle s’adressait aux autres dames de sa condition. Une jalousie qui prit de l’ampleur lorsqu’elle se vit accepter un poste de professeur à l’académie Impériale d’Ilvermorny. Une hérésie pour certains, persuadés que l’Empereur est tombé sur la tête que de confier la jeune génération à cette créature. Un juste retour des choses pour celles et eux ayant pu observer tous les efforts et les mérites de Solveig pour en arriver là. A son savoir magique déjà important, elle n’avait pas manqué d’étudier celui émanant des pierres éthérées, Enoch lui ayant ouvert l’accès aux bibliothèques les plus spécialisées sur le sujet. Ses débuts ne furent pas faciles, ses élèves la mettant à l’épreuve constamment. Pour autant elle tient bon, avec une poigne à peine voilée et un degré d’exigence qui ne leur permettait aucune tergiversation.  


2932 • 40 ans ⎯ La période probation a été menée avec succès et c’est en désormais tant que professeur titulaire que Solveig s’inscrit dans le quotidien de l’académie. Un allié en cachant un autre, ce fut à l’Archimage des Tours magique d’afficher son soutien à la shtrigue, très satisfait des éléments prometteurs arrivant à la Tour après être passés entre ses mains. Une approbation qui fit définitivement taire les médisants et qui servit d’exemple dans la nouvelle politique de tolérance de l’Empereur. La voici évoluant dans un cadre beaucoup plus plaisant, où elle pouvait renouer avec la nature environnante ainsi que quelques-unes de ses anciennes coutumes là, dans la forêt, à l’abri des regards indiscrets. Et sa magie ne s’en porta que mieux. Solveig se sentait plus épanouie certes, mais elle n’était pas dupe : cette place, elle ne l’avait obtenu que parce que les puissants l’avaient souhaité et elle n’avait donc pas plus le droit à l’erreur aujourd’hui que la première fois qu’elle eût franchi les portes de cet établissement. Mais cela n’était plus un problème pour elle, car là où elle choisissait de s’investir, il n’y avait pas de place pour les erreurs.

2954 • 62 ans ⎯ Jamais elle ne connut pareille douleur. Enoch s’en était allé dans son sommeil, après une longue vie prospère, mais controversée. Elle s’y était préparée depuis de nombreuses années et les époux avaient eu cette discussion à diverses reprises car l’espérance de vie humaine n’était rien comparée à celle de sa race. Mais elle ne s’était pas attendue à faire ses adieux à peine son premier quart de vie passé. Elle avait perdu son mari, son ami, son confident de toujours. Mais surtout son protecteur et sa bonne étoile dans un pays réfractaire à sa présence. Un profond sentiment d’insécurité l’avait saisi alors qu’elle se demandait comment sa vie s’en retrouverait modifiée. Il n’existait rien à ce sujet dans ses précieux livres…

2999 • 100 ans ⎯ Tout bonnement un scandale ! s’indignèrent les vieilles carcasses de l’opposition et les conservateurs. Une shtrigue à la tête d’un établissement Impérial, on aura tout vu. L’archimage doit avoir quelques affaires avec elle, pour ainsi lui offrir cette position, se scandalisa-t-on encore. Du haut de sa tour et de son premier centenaire tout juste atteint, Solveig avait soupiré de lassitude. Les esprits humains étaient décidément trop étriqués pour son propre bien. Mais cela ne l’avait pas empêchée d’accepter cette proposition qui venait de lui être faite, à savoir de prendre la tête de l’Académie d’Ilvermorny, qu’elle connaissait mieux que personne à présent, après tant de décennies passées à en parcourir ses couloirs et salles de classes. Elle y avait vu l’occasion de ménager ce corps ayant accumulé toute la fatigue de ces années au service de l’apprentissage magique.  Et peut-être fallait-il y voir un espoir de faire entendre sa voix ?

3003 • 104 ans ⎯ Trois semaines. Trois longues semaines de néant. Comment cela a-t-il pu se produire ? De nouveau, elle se remit à faire les cent pas dans son bureau. La Doyenne avait déjà éprouvé plusieurs nuits sans sommeil et un nombre incalculable de réflexion occupaient sans relâche son esprit troublé. Mais malgré tout cela, aucune explication n’était encore parvenue à faire sens pour elle et si personne ne l’avait aperçue durant ce laps de temps, elle n’en gardait elle-même aucun souvenir. Aucune sensation. Uniquement l’assurance de s’être retrouvée à la fin de la période estivale sans crier gare. Ainsi, Reeve entama un nouveau sillon, marchant de long en large, ses talons claquant sur la pierre à intervalles réguliers.